jeudi 27 août 2020

Saint Hubert et la châsse - GasCondomnade ?

Gasconnade n°5
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En ces temps d'incertitude covidiennes et quotidiennes, où, plus que jamais, les gestes barrière et autres précautions sanitaires sont fortement conseillés quand ils ne sont pas imposés, il n'est pas déplaisant de jouer sur une autre distance, celle du temps ; celui où l'on croyait encore aux miracles que d'aucuns appellent aujourd'hui effet placebo, crédulité, naïveté, foi, etc. selon tous degrés de discernement en usage.
8 juin 1726, selon un aimable chroniqueur, Condom reçoit un personnage prestigieux, lequel se réclame de l'ordre des chevaliers de saint Hubert, nanti de surcroît de multiples titres et fonctions honorifiques dont celle d'abbé dans les Ardennes, chapitrant au moins cent-cinquante moines.
L'illustre quidam est porteur d'une relique du saint éponyme qu'il dépose au couvent des cordeliers pendant qu'il va s'installer pour le temps qu'il faudra à l'hostellerie du Chapeau rouge.
La nouvelle ne met guère de temps à gagner la cité, intra-muros et au-delà des murs, et ce sont bientôt, arrivant en masse de toutes rues et de toutes campagnes alentours, qu'affluent vers le couvent, malades, fidèles et inévitables curieux afin de se recueillir sur la relique, la prier et surtout l'implorer dans l'espoir de force guérisons.
La foule est si importante, environ vingt mille dit-on, qu'il convient de faire ranger les un.e.s et les autres en trois rangées bien ordonnées et sur des centaines de mètres.
Bien évidemment, le chevalier se prête au jeu. Ayant protégé la relique dans une étole qui tient lieu de châsse, il laisse toucher cette dernière par chaque malade, invitant celui-ci à prier avec ferveur saint Hubert dans l'espoir d'une soudaine intercession. De même, il ne manque pas rappeler à chaque fois, la devise "Je te touche, Dieu te guérisse".
Croix de l'Ordre de saint Hubert
Les témoignages recueillis lors de ces pieuses séances sont élogieux et clairs, dont celui-ci :"Que ne vit-on d'estropiés repartir sans leur béquille et sans la moindre claudication".
Fort d'un tel succès, le chevalier séjourna quasiment une semaine avant de poursuivre sa tournée que j'ose qualifier de "triomphale".
Mais pourquoi avoir choisi Condom ? Nul ne le sait précisément. Il est dit cependant que dans l'ordre de saint Hubert, il est convenu d'une tournée à accomplir une fois par siècle pendant une durée de trois ans, ce qui laisse le temps de visiter toutes contrées dont la Ténarèze.
À ces fins, les rois accordent volontiers droits de circuler et d'agir, attendu le pouvoir de guérison qui est reconnu aux chevaliers par simple contact, tant à l'endroit des humains que des animaux.
Évidemment, il y a toujours des esprits chagrins qui proposent une autre vérité. On les dit, selon les siècles et éléments de vérité qui sont les leurs : lanceurs d'alertes, complotistes, journalistes d'investigation, toutes sortes de charlatans et de beaux parleurs, sans oublier ce qui me concerne directement et au titre de la mauvaise foi qui leur sied pour narrer à leur convenance et que je revendique joyeusement, les conteurs.
Selon cette horde dubitative, le personnage qui honora Condom de sa présence fut un imposteur, probable ancien membre de la bande du bandit Cartouche, dont les principaux miracles étaient surtout d'alléger chaque citoyen, non de quelque charge pondérale, mais du poids de sa bourse. En somme, ils guérissaient d'un vice qui rend souvent malade, même à faible niveau : la richesse.
À l'heure où j'écris, nul ne précise encore si, pendant sa semaine condomoise, le désormais vrai ou faux chevalier sollicita dons et prébendes en échange de ses bons soins.
Il est vrai qu'en terme de générosité, la discrétion est conseillée, sauf à vouloir en tirer gloire et arrogance. Elle l'est plus encore quand le vertueux a le souci de cacher qu'il s'est fait littéralement berner par une gasconnade de grande envergure.
C'est pourquoi le débat de saint Hubert et de la châsse est loin d'être achevé, surtout pour ceux qui n'ont plus aucune considération pour les accents circonflexes.
La châsse étant ouverte… « N'hésitez pas à réagir ! »

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